En réédition chez PLEIN CHANT :

 

Reedition Bonnet 1                                 Reedition Bonnet 2

 

        Trois nouveaux titres dans la collection automne des éditions Plein Chant, dont la réédition d' Enfance limousine et de A l'école de la vie, de René Bonnet. Charpentier et écrivain, Bonnet (1905-1988), ami de Poulaille est intimement associé à la littérature prolétarienne ainsi qu'à la création du Musée du Soir (1) en 1935. Collaborateur de diverses revues, il a rédigé de nombreuses notes de lecture et consacré des articles à différents auteurs prolétariens.

       Enfance limousine, publié à compte d' auteur en 1954, retrace l' enfance de Marcelin (Bonnet lui-même; Marcelin est le diminutif de Martial, son grand-père) dans la corrézienne commune de Tarnac(2), plus précisément au "village" de Champeaux, riche de...trois feux.

       L'enfant a été confié par ses parents à ses grand-parents maternels, manifestement entre 1907 et 1919, ainsi que sa sœur, puis son frère.Au total, douze personnes dans la maison.

       Durant ces années, avec en filigrane la guerre, qui mènera père et oncles au front (défense de chanter dans la maison), l'enfant aura l'occasion d' explorer "les 150 hectares de terre de Champeaux dont aucune parcelle, aucun recoin, ne m'était inconnu". L' occasion aussi de découvrir les travaux des champs, au rythme des saisons, la garde des vaches et des brebis, les veillées, les fêtes et... l' école (distante de trois kilomètres) sans compter les espiègleries d' enfant et cette mini guerre des boutons qui, le jour des Rameaux, "divisait les écoliers en deux camps adverse : ceux d' en bas et ceux d' en haut".

       Septembre 1919 et le retour à Paris qui clôt "une jeunesse paysanne libre, donc heureuse"(3).

       A l' école de la vie, bien que publié antérieurement à Enfance limousine (1) retrace la désillusion du retour à Paris:"C'était ça la rue où il était né, où il avait vécu de sept à huit ans? C'était cette rue étroite aux maisons sales?", les réflexions blessantes des passants croisés dans la rue : "Encore un qui n'a pas été baptisé à Notre-Dame". Une dernière escapade à Champeaux, retour à Paris, puis : "huit jours plus tard, une sirène réglait ses mouvements" : commencent les années d' apprentissage en charpenterie de Marcelin Dégabriel (patronyme de sa mère). Débuts difficiles: ne pas tutoyer les compagnons, supporter les surnoms et les "blagues grossières", "mendier pour son patron" (se tenir, les jours de paie, près du guichet, casquette à la main, pour quêter de quoi acheter le blanc d' Espagne). Mais aussi Parain, le "sous- gâcheur" (sous-contremaître) qui l'initie au métier et lui explique, au hasard de leurs déplacements en ville, les particularités de tel ou tel ouvrage; les cours de trait, qui permettent aussi les discussions entre ouvriers, Beauvisage,(5) syndiqué, qui évoque Agricol Perdiguier et le Compagnonnage; l'adhésion au patronage laïque, la lecture de la revue Monde, de Barbusse; au terme, un "compagnon fini", qui renonce à concourir pour le titre de Meilleur ouvrier de France et qui, après un long débat intérieur, refuse de devenir "gâcheur" (contremaître): "Dégabriel sera ouvrier pour gagner son pain et parce qu' il aime manier et travailler le bois, matière vivante. Mais sa vraie vie sera celle qu' il organisera à sa guise, sa journée terminée, ou le dimanche, qu' il prolongera en dormant moins. Sa vie intérieure: libre." C' est tout René Bonnet, dirait le facteur poète Jules Mougin.

       Une réédition qui constitue un bel hommage à l'authentique écrivain prolétarien qu'était René Bonnet.

 

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1- On peut consulter sur ce site une bio-bibliographie consacrée à René Bonnet

2- Qui a "bénéficié", il y a une douzaine d' années, d' une publicité dont elle serait certainement bien passé.

3- Dédicace de Bonnet à René Berteloot, septembre 1954

4- Publié en 1946 par les amis de Bonnet (celui-ci a été prisonnier de guerre de 1940 à 1945) La préface de Jean Prugnot date de janvier 1944 ; l'imprimeur est Fouquin, imprimeur de la revue de Poulaille : Prolétariat

5- Beauvisage est celui qui a fait découvrir les textes de Poulaille à Bonnet ;

 

 

                                                                                                                                                                                                                                  A.P.L.O.